Ce n’est pas parce que tu n’habites pas dans les égouts et que ton goût pour la pizza est modéré que tu ne peux pas être une Tortue Ninja. Et puis, d’abord, les égouts, c’est très surfait. Tu dois te farcir un rat qui boitille à cause d’une pose foirée de prothèse de hanche et un clown qui passe trois plombes dans la salle de bains parce que ton make-up doit être « on fleek » pour zigouiller des gosses. Ca devient pire que Deauville un dimanche.

Bref, j’ai ressorti mes coudières, genouillères, ainsi que mon masque et ma carapace pour affronter l’un des plus grands périls de cette contrée : la SNCF. Bah oui, parce que la folle dingotte que je suis a trouvé que ça serait pertinent de passer 7 heures dans un TGV neurasthénique, à bosser. Ce qui s’est irrémédiablement transformé en sorte de mini-ZAD – sans le radiocassette avec le Best Of de Tryo, merci Krishna – , à jongler entre ordi et carnet de notes -c’est toujours plus simple qu’avec un bâton en feu, tout en évitant que ton thermos fasse une roulade avant sur ton clavier et découvrant avec délice l’organisation adoptée par ton voisin lors de ses congés de Noël – parce que le gars bramait comme un vieux cervidé dans son téléphone. Et après avoir contourné une partie de la région parisienne parce que des gens étaient présents sur les voies – pour manifester contre les wall walks, peut-être – le trajet n’a pas connu d’autres encombres que des enfants avec une vessie bien trop petite par rapport à leur consommation de Capri-Sun.
Un petit passage sous le signe Hollywood Marseille plus tard, je découvre – brièvement- l’une des plus vieilles villes de France. Et ça se voit qu’elle sucre un peu les fraises, Mémé. Un peu comme chez ma voisine du rez-de-chaussée, le transit se fait mal. On espère juste qu’elle ne connaît pas trop de problèmes de fuites. Toujours est-il que ces ennuis de type occlusif m’ont valu de tenter un plaquage avec valise sur un chiot puis un encastrement sur siège passager dans la veine cubiste. Bah dis donc, sacrées présentations…
Le lendemain, la compétition commence à midi pétantes. Un horaire qui aurait du être suspect pour les athlètes. Midi, c’est un peu le dernier carat pour se mettre à table. En tout cas, si tu en crois les considérations de ma belle-mère. Clairement, ce n’est pas une heure pour faire une compétition. Sauf peut-être celle du plus gros mangeur de sandwichs au mousson de canard. Certes, ça te laisse le temps d’affronter les aléas d’une circulation trollée par des retraités embaumés dans la naphtaline et les dettes suite à un achat de monte-escalier. Mais tu te dis que, potentiellement, c’est aussi un message caché : « j’espère que tu as fait une bonne nuit de sommeil ». Parce que ça va tabasser. Et ça a tabassé. Dès le début. Vlan, pas de pacotilles : WOD de 30 minutes. Max cal sur l’assault bike pendant que ton binôme fait le tour de la salle en courant, avec un sac lesté. Un peu en mode, je cherche une place de parking et, en même temps, je ne fais qu’un seul voyage avec les courses. Mais pendant 30 minutes, avec un changement à chaque tour. Bref, tu n’as plus qu’à espérer que ton binôme n’a pas tenté une soirée croziflettes et clafoutis sinon il risquait de nous faire une petite galette – qui n’avait franchement rien de breton – au détour d’une kia rio garée à proximité.




L’avantage, c’est que tu es bien échauffé pour le WOD 2 – ou tu as déjà entamé ton stock de citrate de bétaïne : un AMRAP de 17 minutes en mode You Go, I Go avec 5 chest to bar, 3 facing burpees box over et 2 squat snatchs. Potentiellement, ça va beaucoup trop vite et ça peut partir en vrille. Un peu comme une nana qui s’énerve toute seule et que tu finis par t’excuser de trucs que tu n’as pas fait. Oui, toi-même tu sais.



La journée s’est achevée par un « petit » WOD sponso par Monique Ranou. Comment ça, tu ne remets pas Tata Monique? Ca se voit que tu fais tes courses chez Biocoop, espèce de porteur de sarouel, va. Range ta flûte de Pan et découvre un peu les dures réalités de la vie. Tout le monde n’a pas basculé dans le shampoing solide. Et cette frange majoritaire de la population connaît Monique Ranou, elle, parce qu’elle cagnotte des points en allant acheter des saucissons chez Intermarché. Bah oui, Monique, c’est la reine de la charcut. Or, le WOD 3 était sous le signe de l’éclatage de jambon. Pas littéralement parce que c’est moche de gâcher de la nourriture et qu’il y avait peut-être des vegans dans l’assistance. Il s’agissait de réaliser un complex avec 1 RM squat clean et 3 front squats. Un combo qui peut rapidement devenir bien plus lourd que l’humour de Tatie Josette après deux kirs à la pêche.

Une fois les grosses barres passées, c’était l’heure du bar. Oui, je sais, elle était bien trop facile, celle-là. Tatie Josette me possède ! Ou en fait, il est possible que ce soit moi qui raconte n’importe quoi après deux verres. Juste que je n’aime pas les kirs pêche. J’ai toujours trouvé le principe du sirop bien trop surfait. Tout ça pour dire que la box avait fait péter la tireuse à bières de compet – ce qui était fort à propos compte tenu des circonstances. Puis, pendant que les compétiteurs tentaient de retrouver forme humaine à grands renforts de baumes qui schlinguent la fumerie d’opium clandestine, on allait vivre une expérience surnaturelle. On a découvert Jacky Vincent. Oui, le Jean-Michel à peu près de Francky Vincent.
Sauf que le bonhomme n’avait rien de Guadeloupéen. Boudiné de sa plus belle chemise satinée Armand Thiery, il avait forcé sur l’autobronzant et sur la coloration L’Oréal Préférence, nuance 4.15 Caracas Marron Foncé. Tel le fils naturel d’un oompa loompa et de Tom Jones, il gazouillait en italien avant de finir par définitivement rouler sur la jante et interpréter une chanson à propos du confinement sur un air de Cabrel. Un peu comme si tu participais à « 4 mariages pour une lune de miel », mais à ton insu. Sinon le plat était bon mais ça manquait de kir pêche. Il faut que je réfléchisse à ma note pour la grande finale de vendredi !
Bref, la soirée était très divertissante ! Un peu comme un avant-goût du WOD 4, mais sans la réinterprétation d’Eros Ramazzotti. D’ailleurs, c’est fort dommage parce que le workout était en mode fuocco nel fuocco. Imagine : un DT (donc 5 rounds de 12 deadlifts, 9 hang cleans, 6 shoulder to overheads) avec un worm, et précédé, de 15 burpees over worm synchro (à chaque tour, évidemment ! Tu t’es cru chez Fitness Park ou quoi?)



Je vais t’avouer un truc. J’avais très envie de tester le worm. Mais de voir la douleur, la désolation et la détresse s’imprimer sur le visage des compétiteurs….bah ça m’a convaincue.
Oh ça va, je sens que tu me juges. J’aime bien les thrusters. Donc ce n’est pas vraiment un signe de bonne santé mentale. Je n’y peux rien, j’ai eu des traumatismes dans mon enfance. Ma mère m’a fait croire qu’elle m’avait acheté des draps Barbie alors qu’il s’agissait juste d’une parure avec des coeurs achetée à la Blanche Porte. Vlan, dix ans de psychanalyse.
J’espère sincèrement que la majorité des équipes n’était pas constituée de couples. Parce que sinon, je pense qu’il y a eu une grosse vague de divorces dès la semaine suivante. Ce n’est pas pour balancer mais j’ai bien cru que certains allaient se prendre une main dans la tronche. Quand on vous dit que la communication, c’est essentiel.
Surtout quand on sait que le WOD suivant voyait le retour du worm, en mode thrusters. Le tout précédé d’un max de cal au skierg en 3 minutes, 3 minutes de max sandbag over shoulder, puis thrusters, 3 minutes de sandbag squat cleans et 3 minutes de max HSPU. Et le pire, c’est qu’à la fin, il y avait encore des gens qui étaient vivants. Même si, clairement, beaucoup ont pris le worm pour un convertible Cuir Center. Menfin, tes pieds sur le canapé, Kevin !!


Et si tu crois que, ensuite, c’était une soupe et au lit, bah revois tes ambitions. Tu croyais vraiment qu’on allait te laisser chiller devant 66 minutes le mag comme ça? Ce n’était pas un dimanche comme les autres ! Surtout que plein de mouvements manquaient encore à l’appel. Comme des wallballs du poids d’un enfant de 3 ans (oui 3 ans, pas 36 mois. C’est un gosse, pas une foutue meule de Parmesan) – à savoir 9 kilos pour les dames, 15 pour les messieurs. A priori, des medecine balls de 15 kilos, ce n’est pas une légende urbaine. Il y avait aussi des overheads lunges synchro à 40/60 kilos, des legless rope climbs à 4m50 (permettez, j’ai pas pris mes cachets contre le mal de l’air), des muscle-ups bar et version ring + stricts. Je ne te dis pas tout parce que mon cerveau a vrillé devant tant de variété.
Indéniablement, participer au Estroublans Showdown, c’est la garantie de verser de la sueur, un peu de sang si tu as des mains de fragile, des larmes si ton binôme communique aussi bien qu’un candidat de téléréalité, de lâcher quelques perlouzes foireuses, de finir par vaguement perdre le contrôle de ton corps, et surtout, de te challenger lors d’épreuves plus complètes qu’une galette bretonne (je sais, on tient une thématique sur cet article).


Si tu as l’habitude de faire des petits WODs confortables en mode « j’ai fait ma manucure de Noël il y a deux jours », reste sous ton plaid Primark. Assurément, ça tabasse. Et rien qu’à regarder, il y a de quoi être impressionnée par la programmation autant que par les performances des athlètes en lice. Le tout mené d’une main de maître par une équipe de Power Rangers sans les collants (mais avec des habits quand même), menée par un cerveau maléfique de la prog et de la punchline. Encore bravo, les copains et merci pour tout !
CrossFit Serval
15 Av. de Londres, 13127 Vitrolles
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