On continue notre voyage en terres francophones ! Après avoir fait connaissance avec Vanessa, expatriée au Canada, on se tourne du côté de la Belgique afin d’échanger avec Manon Angonèse. Après sa 12e place aux Regionals, c’est au French Throwdown qu’elle nous a consacré quelques minutes pour répondre à nos questions.
Peux-tu te présenter?
Je m’appelle Manon Angonèse, je suis belge, j’ai 25 ans. Ma box est au Luxembourg, donc je représente les couleurs luxembourgeoises pour l’instant. Mais je suis belge ! J’ai commencé le CrossFit il y a 2 ans 1/2.
« J’ai besoin de la compétition dans ma vie. »
Quel a été ton parcours sportif?
Je suis une ancienne cavalière professionnelle. Ca a été mon métier. J’ai commencé à travailler à l’âge de 14 ans jusqu’à mes 22 ans, lorsque j’ai mis un terme à ma carrière. C’est mon seul background…
C’est déjà un beau background !
Oui ! Ce n’est pas un background sportif mais je pense que j’ai un plus gros background mental. Et l’habitude d’un plus grand volume de travail. C’est ce qui m’avantage beaucoup, je pense.
Comment es-tu passée de cavalière à athlète de CrossFit?
Quand j’ai mis un terme à ma carrière, il fallait que je reste dans la compétition, dans le sport. En faisant ma formation de préparatrice physique, mon maître de stage était CrossFit Level 1 et il m’a fait découvrir le CrossFit. Là, je me suis dit « OK, ça, c’est un challenge. Je veux en faire ». J’ai directement accroché et je n’ai plus jamais lâché.
Tu te souviens de ton premier WOD?
Oui ! Comme j’étais en formation dans un cabinet de kinésithérapie, c’était avec les moyens du bord. Mais je me rappelle que j’avais eu des thrusters barre à vide, des burpees, des conneries comme des sit-ups, …C’était horrible ! J’ai fini mon WOD, j’ai aussitôt envoyé un message à mon copain pour lui dire « j’ai essayé le CrossFit, c’est horrible, je ne veux plus jamais refaire ça! » Et le lendemain, je recommençais…
« Quand je ne m’entraîne pas, je coache. Et quand je ne coache pas, je m’entraîne. »
Comment la décision s’est opérée de faire du CrossFit en tant que compétitrice? C’est un prolongement de ton expérience comme cavalière?
J’ai besoin de la compétition dans ma vie. J’ai commencé à monter à cheval à l’âge de 4 ans, et à faire de la compétition à 5 ans. Depuis, presque tous les week-ends étaient consacrés à la compétition. Si je n’ai pas de compétition dans ma vie, je me fais vraiment chier.
Que t’apporte la compétition par rapport à un WOD quotidien? L’adrénaline? L’envie de te dépasser encore plus?
C’est l’adrénaline. C’est inexplicable. Une fois que le chrono sonne en compétition, je pourrais avoir une fracture ouverte du fémur, je ne la sentirais pas. Je suis sous adrénaline à 300%.
Comment gères-tu ton entraînement au quotidien?
Je travaille avec Matthieu Dubreucq de Force 5, pour tout ce qui est CrossFit pur. Maintenant, j’ai beaucoup évolué ces derniers mois et je travaille avec pas mal de personnes différentes comme Immade Hamma (SaiyaGym CrossFit) pour tout ce qui est gymnastique, avec Fares Zitouni (Club d’Haltérophilie de Vaulx-en-Velin) pour l’haltéro. Depuis peu, je travaille avec un triathlète français, Cyril Routier qui s’occupe de toute ma préparation Aerobic Capacity. J’essaie de regrouper des personnes autour de moi afin de tenter de gagner 1% à chaque fois, dans tous les domaines. On a encore du chemin mais je m’équipe. Je m’entraîne 6 jours/semaine, avec juste le dimanche comme rest day. Je m’entraîne au moins deux heures le matin et au moins deux ou trois heures l’après-midi.
« Aux Regionals, on a lâché la bête ! »
Ca fait un gros volume d’entraînement…
Oui mais j’y suis habituée. En tant que cavalière, je commençais à 6 heures du matin pour terminer à 8 heures tous les soirs. Donc j’ai besoin de volume.
Et en parallèle, tu es coach…
C’est ça ! Quand je ne m’entraîne pas, je coache. Et quand je ne coache pas, je m’entraîne.
As-tu l’impression que coacher t’apporte des choses en plus en tant qu’athlète?
Beaucoup ! Par exemple, avant les Regionals, j’ai programmé les WODS des Regionals à mes adhérents et ça m’a aidée de les voir, de voir différentes tactiques. Le fait de répéter les mouvements avec le PVC, les détailler, voir les gens bouger et échanger avec eux, ça m’aide énormément.
Peux-tu revenir sur tes dernières compétitions?
Je me suis lancée dans l’Open avec la volonté de me qualifier. C’est horrible comme compétition pour moi, car tout est en ligne. Ce n’est vraiment pas pareil ! J’étais dernière qualifiée de ma région, donc jusqu’au dernier moment, ça a été beaucoup de pression. Je ne savais pas si j’allais aux Regionals ou pas.
Aux Regionals, on a lâché la bête ! Je n’attendais que ça ! Je voulais prouver que la 20e place Europe Central, ça n’était pas ma place. Je suis très contente d’avoir montré que les résultats de l’Open n’ont rien à voir avec les résultats dans l’arène. Je suis très contente de ce que j’ai fait aux Regionals. C’est le travail d’un an, un an et demi qui a payé. Maintenant, je sais sur quoi travailler.
Comment s’est passé ton passage à Berlin?
J’étais hyper excitée ! J’étais impatiente, j’avais l’impression d’avoir attendu ça toute ma vie.
« Me dire que j’ai wodé dans la même vague qu’Annie Thorisdottir, que j’ai pu me mesurer à elle, c’est énorme. »
Tu n’avais pas d’appréhensions par rapport aux personnes face auxquelles tu allais te retrouver?
Je savais que notre région allait être très dure, forcément, avec tous les Vikings et les athlètes du nord ! Mais en même temps, c’est énorme de pouvoir se comparer à ces filles-là. Ce sont des athlètes qui font les Games depuis 10 ans pour certaines comme Annie (Thorisdottir, NDLR). Me dire que j’ai wodé dans la même vague qu’elle, que j’ai pu me mesurer à elle, c’est énorme. Et j’ai hâte d’être dans quelques années pour lui mettre un jour une raclée sur un WOD (rires).
Quel est ton meilleur souvenir des Regionals?
Je crois que c’est le WOD 1 (le triple 3, NDLR). J’avais une stratégie et je ne l’ai pas lâchée. En fait, pour expliquer ce qu’il s’est passé, je sors dernière ou avant-dernière du rameur. Je monte sûrement dernière sur le Air Runner, mais c’était mon plan : vraiment démarrer doucement sur des choses que je ne maîtrise pas aussi bien que certaines athlètes. Et là, sur la course, je me suis dit « OK, la course, c’est ton truc. Et c’est sur ça que tu vas pouvoir rattraper ». Et en effet, d’avoir gardé ma stratégie, ça m’a permis de passer sur le WOD de dernière à quatrième. J’en suis très contente. Car quand on a une stratégie, il faut la garder et pas forcément regarder les autres. C’est mon meilleur souvenir.
Donc, tu as réussi à te mettre dans ta bulle?
Carrément. D’ailleurs, quand je courais, je comptais avec ma main. 10 mètres, 20 mètres, … J’avais vraiment des TOC ! Je ne sais pas si ça s’est vu sur les vidéos mais je sais que j’avais ma juge, en face de moi, qui regardait ma main et dès que j’abaissais la main, elle prenait le chesspiece pour le bouger.
J’ai l’impression que tu fais un gros travail sur le mental. Comment tu le travailles? Par du coaching, de la lecture, …?
Il y a eu de la lecture. J’essaie de me rappeler que ce que je fais maintenant, par rapport à la vie que j’ai eu avant, ce sont des vacances ! J’ai été exploitée toute ma vie en tant que cavalière. Donc je n’ai pas le droit de me plaindre parce que j’ai mal sur 15 burpees. Maintenant, je me dis que j’ai vécu cent fois pire. J’essaie de me rappeler constamment que, ce que je vis, ce n’est pas un drame.
« Quand on a une stratégie, il faut la garder et pas forcément regarder les autres. »
Malgré tout, y-a-t-il des mouvements ou des WODs devant lesquels tu rechignes un peu?
C’est particulier….Je ne sais pas si d’autres athlètes sont comme ça, mais si par exemple, je vois un WOD horrible, je me dis « génial ! » Je sais que je vais en chier et je sais ce que je vais pouvoir travailler après. Je suis préparée à souffrir. Je dois être un peu maso. Plus le WOD va être à mon désavantage, plus je vais aimer le faire.
Si tu devais avoir un mouvement préféré?
Des ring muscle-ups. Stricts ou kipping. Tout ce qui se passe aux anneaux, c’est mon truc. La course à pied et le snatch.
Et côté nutrition, tu as un accompagnement?
Je travaille avec Idriss Heerah de We Nutrition. Il fait un travail de fou avec moi. Il a vraiment réussi à trouver l’équilibre. Donc grâce à lui, je suis désormais plus légère et je suis plus forte. Il fait vraiment un travail incroyable.
Quels sont tes prochains objectifs? Tu as envie de travailler dans quelle direction?
Après le French, il n’y aura plus de compétitions avant l’Open. Sauf peut-être les Dubai, si je me sens de les faire. Mais le focus, ça va être les Regionals de l’année prochaine. Si oui ou non, un Top 5 aux Regionals. Si ce n’est pas cette année-là, l’année d’après. On va tout faire pour. Si ce n’est pas en 2019, ça sera en 2020. Sinon 2021…C’est l’objectif de toute une vie !
Un dernier mot?
J’aimerais dire merci à tous mes sponsors, ceux qui m’aident financièrement. THORUS, Idriss qui travaille avec moi, Eric mon physio, tous mes coachs et mon chéri qui me soutient tous les jours.
Merci beaucoup Manon d’avoir répondu à mes questions !